Bon alors, cette transat ? Racooooonte…
Une transatlantique c’est une très belle aventure, un grand moment de découverte, c’est aussi aller contre bon nombre d’idées reçues et de préjugés.
En fait, je ne peux parler d’une transatlantique en général, je peux juste évoquer celle que j’ai faite sur Toumim, avec Joël et Gérard, mes deux équipiers pendant 20 jours pour rallier les Canaries au Brésil via le Cap Vert. Chaque transatlantique est différente, je crois que c’est une traversée très personnelle.
Ce que j’en retire au moment où nous arrivons ? Comme ça, à chaud ? Là tout de suite ?
Mmmmh, attends…
D’abord et avant tout, tu n’es rien face aux éléments. Beaucoup plus que tu ne le crois. Ce sont eux qui décident de ta route précise, de ta vitesse, du temps que tu mettras, de ton équilibre à bord.
En l’occurrence, après semé le doute avec la si lente et si longue traversée Canaries – Cap Vert, le vent nous a offert le cadeau de foncer vers le Brésil. Nous avons explosé nos estimations en arrivant 4 jours d’avance sur nos prévisions les plus optimistes. J’ai aussi découvert la houle qui fait tout valser, même les estomacs les plus accrochés. J’ai piaffé en regardant la vitesse du vent. J’ai lutté … Mais ce n’est pas toi qui décides.
Je te dirais donc qu’il ne vaut mieux pas résister. Mais composer avec. Accepter. Je ne parle pas que de la météo. C’est toujours facile à dire, je sais. Quand tu te sens coincé dans un bateau, pas de soupape, pas moyen d’aller faire un tour dehors et revenir. Le recul, il n’est pas plus loin, il doit être là, tout près, en toi.
Il y a aussi de bien belles surprises. Ce que tu redoutais avant le départ passe tout seul, très bien même. Pas une minute d’ennui. Pas une seconde de tension au sein de l’équipage. Beaucoup de calme, un calme paisible plein de compréhension.
Enfin, les petites choses prennent une belle place. Un ciel qui émeut, une ligne d’horizon qui attire, une houle qui laisse enfin souffler, un plat qui met les papilles à la fête, une pitrerie qui résonne longtemps dans les sourires, un fou de Bassant qui annonce que la terre est proche, le bruit de l’eau qui apaise… Qu’il est bon d’en profiter, de faire perdurer ces instants au rythme des vagues qui entraînent l’esprit vagabond !
J’ai continué mon carnet de bord (ici). Pour ne pas oublier toutes ces petites choses qui m’ont paru grandes. Pour suivre les jours. Un ami m’avait dit qu’au bout de trois jours, on ne les comptait plus. Je n’ai pas arrêté de compter, mais il est vrai que le temps prend une toute autre dimension, difficile à décrire, quelque chose de plus long et plus court à la fois, de plus élastique peut-être.
Nous allons arriver dans quelques heures au Brésil, et je quitterai d’ici peu la mer pour arpenter le monde avec mon sac à dos. Sans y attribuer une importance démesurée, cette traversée m’aura fait passer aux grandes eaux un je-ne-sais-quoi que je laisse derrière, un joli passage pour aller découvrir plus loin, plus grand. Il y a quelque chose de quasi baptismal dans une transatlantique, du moins dans celle que j’ai vécue…
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